Le chemsex — mot-valise combinant « chemical » (produits chimiques en anglais) et sex — ou sexe sous drogue[1] est une pratique consistant à associer rapports sexuels et prise de drogue. Elle peut favoriser des conduites à risques. On l’appelle party’n’play (PnP) aux États‐Unis ou wired play en Australie.
Le terme est le plus souvent associé à l'homosexualité masculine (hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes)[2], mais ne lui est pas exclusif[3]. Le chemsex est lié à la banalisation de l'utilisation des applications de rencontres géolocalisées, qui permettent les échanges et rencontres rapides entre partenaires[4]. Par rapport à d'autres usages récréatifs de drogues, le chemsex implique une consommation strictement au service d'activités sexuelles qui peuvent être extrêmes, non protégées (« bareback »), prévues pour une longue durée (plusieurs heures à plusieurs jours), et impliquant plusieurs partenaires dénommés « chemsexers »[4].
Apparu en Angleterre au milieu des années 2000, il s'est depuis répandu en Europe et notamment en France[5],[6].
On parle de Slam quand les produits sont consommés en intraveineuse[7],[8]. Ce terme, qui vient de « to slam », « claquer » en anglais, est utilisé pour décrire l’effet puissant lié à l’injection[9].
La pratique du chemsex peut entraîner une insatisfaction sexuelle ou une absence totale de relations interpersonnelles qui peuvent être frustrantes[4]. Elle peut donc conduire à un isolement[10].
Le chemsex est associé à une combinaison de risques qui peut le rendre alarmant. Il se pratique notamment en groupe, et la consommation de drogues rend le recours au préservatif moins systématique, le chemsex est donc souvent associé à un fort risque de contamination notamment par le VIH et d'autres IST. Par ailleurs, les surdosages, une mauvaise descente, des interactions imprévues entre drogues font également partie des risques associés à la pratique.
Entre 2008 et 2017, 24 décès liés au chemsex ont été recensés en France[4].
Selon certaines sources, la pratique serait très minoritaire parmi les HSH (ainsi en 2015, un sondage à Londres montrait que seulement 2,7 % des personnes interrogées avaient fait usage de drogue injectée au cours de l'année précédente). Certains (tel Marco Scalvini, enseignant italo-britannique à la London School of Economics) estiment que l'usage de cette pratique est exagérée par certains médias qui relaieraient selon eux ainsi l'idée que le sexe est un problème de santé publique, plutôt qu'une source de transgression et de plaisir[11]. La pratique semble plus répandue et plus problématique au Royaume Uni qu'en France[12],[13].
Cependant, les résultats de l'étude « Sea, Sex and Chems » dévoilés en novembre 2021[14] montrent que le chemsex est en essor en France depuis le début des années 2010 et concerne un public de plus en plus jeune[15]. Selon une étude hollandaise[16] citée par plusieurs journaux, près de 30 % des utilisateurs des applications de rencontres gay s’adonneraient au chemsex[15],[17]. Le chemsex concerne aussi des personnes hétérosexuelles et des femmes[18].
En 2022, le constat fait dans un rapport rendu au ministère de la santé[19] (puis enterré) est qu'on ne sait pas précisément l’étendue du phénomène en France, ni le nombre de morts par overdose ou de personnes ayant dû être hospitalisées[20].
Les associations et professionnels de santé manifestent pour que ce rapport, dirigé par le Professeur Benyamina, soit exploité notamment avec une étude épidémiologique à l'échelle du territoire. Un élu du Rhône, Yann Botrel, addictologue, spécialiste du chemsex, le demande régulièrement.[1][21]
Quelques semaines après le début du confinement imposé pendant la pandémie de Covid-19, les produits restaient disponibles, ce qui a écarté le risque de sevrage forcé. Un risque est que la disparition d'un cadre professionnel structurant entraîne une perte de contrôle de la consommation, mais les associations mettent en place de nouveaux systèmes pour garder le contact et aider les consommateurs[22] et constatent qu'ils respectent plutôt bien le confinement[23]. Les pratiques auraient cependant augmenté à la faveur des confinements[24]. Et des spécialistes notent que le confinement ouvre de nouvelles situations et amène des problèmes plus graves[25],[26].
Plusieurs personnalités politiques, addictologues et associations réclament un plan de grande envergure en France. Parmi eux: Jean-Luc Romero-Michel qui a perdu son mari en 2018 lors d'un chemsex, le Professeur Amine Benyamina, auteur d'un rapport ministériel en 2022, Yann Botrel[27],[28], élu du Rhône et spécialiste du chemsex ou Fred Bladou de Aides[29],[30].
D'autre médecins addictologues restent actifs sur le sujet comme le Pr Hélène Donnadieu du CHU de Montpellier ou le Pr Benjamin Rolland à Lyon (corédacteur du rapport Benyamina)[31].
La pièce de théâtre 5 Guys Chillin’ de l’auteur anglais Peter Darney décrit l’ambiance d’une partouze gay sous chemsex[32].
Le roman Chems de l'écrivain français Johann Zarca, paru en 2021, est le récit d'une enquête en immersion par un journaliste connu pour sa connaissance des milieux underground parisiens[réf. nécessaire].
« Livret d’information pour les professionnel[le]s et les intervenant[e]s de santé », Réseau de prévention des addictions, (ISBN978-2-9550677-4-1, lire en ligne)
↑(en-GB) Marco Scalvini, « Gay men need clear information about ‘chemsex’, not messages about morality | Marco Scalvini », The Guardian, (ISSN0261-3077, lire en ligne, consulté le )
↑ a et b« Le « chemsex », une pratique à risque aux usagers toujours plus jeunes », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
↑(en-US) Susanne Drückler, Martijn S. van Rooijen et Henry J. C. de Vries, « Chemsex Among Men Who Have Sex With Men: a Sexualized Drug Use Survey Among Clients of the Sexually Transmitted Infection Outpatient Clinic and Users of a Gay Dating App in Amsterdam, the Netherlands », Sexually Transmitted Diseases, vol. 45, no 5, , p. 325–331 (ISSN0148-5717, DOI10.1097/OLQ.0000000000000753, lire en ligne, consulté le )