Élevé en grande partie à Montevideo (Uruguay), dans une famille argentine parfaitement francophone dont le père est directeur de journal et député anti-péroniste, tirant peut-être du goût de ce dernier pour la peinture un talent précoce pour le dessin, Raúl Damonte Botana collabore dès l’âge de 16 ans au journal satiriqueTía Vicenta[2].
Les activités politiques de son père l’obligent à s'exiler en sa compagnie à Haïti puis à New York.
En 1963, il le quitte pour s’installer à Paris dans l’espoir d’y vivre de sa passion, le théâtre. Mais sa maîtrise imparfaite du français le conduit à vivre dans un premier temps du dessin. Sous le nom de « Copi », il entre alors à Twenty, puis à Bizarre[2]. C'est dans cette dernière revue qu’à l’automne 1964, Serge Lafaurie, à la recherche d’une bande dessinée pour Le Nouvel Observateur, le remarque.
S’il amorce alors sa collaboration à l’hebdomadaire de la rue d’Aboukir, il dessine aussi pour Hara-Kiri, Charlie Hebdo et leur homologue italien, Linus. Se distinguant par un graphisme aigu et un humour surréaliste, il atteint la notoriété dans la série La Dame assise avec son personnage de dame assise au gros nez et aux cheveux raides qui, figée sur sa chaise, monologue, ou dialogue avec un volatile informe. Selon Marilú Marini[3],
« [il a] créé son exact opposé avec cette femme pleine d’a priori qui veut rester sur sa chaise sans bouger, car tout ce qui peut ébranler ses convictions est pour elle un grand danger. »
Avec les revenus qu’il tire du dessin, il peut ainsi se consacrer au théâtre en compagnie de ses amis Víctor García, Alejandro Jodorowsky et Jérôme Savary qui est le premier, en 1964, à monter de courtes pièces qu’il a écrites. Jorge Lavelli prend la suite en montant Sainte Geneviève dans sa baignoire, La Journée d'une rêveuse au Lutèce (1966) et L'Homosexuel ou la Difficulté de s'exprimer (1967) où Copi joue lui-même un travesti délirant[4]. En 1985, c'est aussi Lavelli qui crée au festival d'AvignonLa Nuit de Madame Lucienne, avec Maria Casarès[5].
S’il dénonce le régime argentin, comme dans Eva Perón (monté à Buenos Aires en 1970), il est aussi proche du mouvement du Front homosexuel d'action révolutionnaire (FHAR) qui traduit un rapprochement entre l'extrême gauche maoïste et les homosexuels.
Compagnon de Guy Hocquenghem, figure de proue du mouvement gay, il suit ce dernier à Libération où, avec Jean-Luc Hennig, Christian Hennion ou la militante trans Hélène Hazera, ils forment à partir de 1973 un petit groupe d’homosexuels au sein de la rédaction. L'été 1979, de juin à août, il dessine une petite créature inventée sur mesure pour le quotidien : Libérett'. Ses dessins politico-pornographiques, mâtinés d'humour noir et franchement potaches, réagissent à l'actualité en s'en moquant et font rapidement scandale. Un terme est mis à l'aventure Libérett' dès la fin du mois d'août 1979. Libération rappellera pourtant Copi en 1982 où il reviendra avec un autre personnage, plus sage cette fois-ci, Kang le kangourou, dont les dessins seront compilés plus tard dans un album du même nom.
Auteur de nombreuses pièces dans la seconde moitié des années 1970 et la première partie des années 1980, Copi meurt des suites du sida à 48 ans en 1987, alors qu'il était en pleine répétition d’Une visite inopportune, dont le personnage principal est un malade du sida qui se meurt dans un hôpital.
2016-2018 : L'Ombre de Vanceslao, version opéra, mis en scène de Jorge Lavelli
2019 : 40° sous zéro, diptyque de L'Homosexuel ou la Difficulté de s'exprimer et Les Quatre Jumelles, mes de Louis Arene avec la compagnie du Munstrum Théâtre, La Filature (Mulhouse) et Le Monfort (Paris)
Lors de la séance de décembre 2018, le Conseil de Paris vote le vœu de l'apposition d'une plaque commémorative en sa mémoire rue Cauchois, dans le 18e arrondissement[9].
Isabelle Barbéris, Catherine Dousteyssier-Khoze (dir.) et Floriane Place-Vergnes (dir.), « Copi, le travestissement entre parodie et vanité », Modern French Identities, Berne, Peter Lang, no 55 « Poétiques de la parodie et du pastiche de 1850 à nos jours », (ISBN9783039107438).
Isabelle Barbéris, Florence Fix (dir.) et Frédérique Toudoire-Surlapierre (dir.), « L’Épopée verbale de Loretta Strong », dans Le Monologue au théâtre (1950-2000). La Parole solitaire, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, coll. « Écritures », (ISBN291555255X).
Olivier Neveux, « Rire comme une folle… Sur d’éventuels effets politiques de la parodie La Tour de la Défense de Copi », Recherches et Travaux, Grenoble, Université Stendhal-Grenoble 3, no 69 « Du comique dans le théâtre contemporain », (ISBN9782843100994).
Lionel Souquet, « L'Immoderato cantabile d'un Argentin francophone », in Littératures en mutation, écrire en situation bilingue, sous la direction de Françoise Morcillo et de Catherine Pélage, Orléans, éditions Paradigme, 2013, p. 131-158.
Thibaud Croisy, « Le temps d'un été, Copi libère "Libé" », blog du Monde diplomatique, juillet 2013.
Isabelle Barbéris, Les Mondes de Copi, Machines folles et chimères, ed. Ôrizons, Paris, 2014.
Thibaud Croisy, « Mais si, Bibine, les pédés font leur strip ! », dans Vive les pédés, Copi, Éditions de l'Olivier/Cornélius, coll. « Olivius », 2014, p. 5-14.
Lionel Souquet, Copi et Puig, ovnis du théâtre argentin ?, ILCEA, 22| 2015, mis en ligne le .
Thibaud Croisy, « Copi, ou les métamorphoses du mauvais esprit », in Contre-cultures 1969-1989 – L'Esprit français, sous la direction de Guillaume Désanges et François Piron, La Découverte/La Maison Rouge, 2017, p. 170-179.
Thibaud Croisy, « Une folle au pays des merveilles », postface au Bal des folles de Copi, Christian Bourgois éditeur, 2021, p. 165-189.
Thibaud Croisy, « Homosexuel, vraiment ? », postface à L'Homosexuel ou la difficulté de s'exprimer suivi des Quatre Jumelles, Christian Bourgois éditeur, 2022, p. 119-156.
Thibaud Croisy, « Se travestir par la parole. Le travestissement dans l'œuvre de Copi », Artcena, mis en ligne le 6 septembre 2022.
Thibaud Croisy, « Les "pédés" ou comment s'en débarrasser », postface à La Guerre des pédés de Copi, Christian Bourgois éditeur, 2023, p. 149-175.
Thibaud Croisy, « Copi » (notice illustrée sur la représentation du sida dans l'œuvre de Copi), in Aux temps du sida. Œuvres, récits et entrelacs, sous la direction d'Estelle Pietrzyk, éditions des musées de Strasbourg, 2023, p. 60-63.
Thibaud Croisy, "A Queen in Wonderland" (version révisée et actualisée de la postface au Bal des folles de 2021), traduit par Olivia Baes, in The Queens'Ball de Copi, traduit par Kit Schluter, New York, Inpatient Press, 2024, p. 165-197.
Thibaud Croisy, « Dans la nuit noire de la sexualité », postface à Lamento pour un ange de Copi, Christian Bourgois éditeur, 2024, p. 141-166