L’humour noir est une forme d'humour qui souligne avec cruauté, amertume et parfois désespoir l'absurdité du monde, face à laquelle il constitue quelquefois une forme de défense. Faisant généralement appel à l'ironie et au sarcasme le plus violent, il doit être parfaitement maîtrisé pour ne pas être confondu avec de la simple grossièreté ou de la méchanceté gratuite, car il fait souvent appel aux différents degrés de langue que le grand public est rarement capable de comprendre[1].
L’humour noir consiste notamment à évoquer avec détachement, voire avec amusement, les choses les plus horribles ou les plus contraires à la morale en usage (la mort et ses thèmes connexes sont fréquents dans cette forme d'humour). La morale comme la loi étant des notions variables selon les cultures et les époques, les sujets évoqués varient également.
Il établit un contraste entre le caractère bouleversant ou tragique de ce dont on parle et la façon dont on en parle. Ce contraste interpelle le lecteur ou l’auditeur et a vocation de susciter une interrogation et le réveil de sa pensée critique[2]. C’est en quoi l’humour noir, qui fait rire ou sourire des choses les plus sérieuses, est considéré par les pouvoirs en place comme étant potentiellement une arme de subversion.
Empreint de fatalisme, pathétique par certains côtés, cet humour est forcément une source de gêne. Certains présentent d’ailleurs cette gêne comme un de ses ressorts, dans la mesure où le rire qu’il provoque doit gêner, voire donner honte, faire hésiter celui qui en rit entre sa réaction naturelle, le rire, et sa réaction réfléchie, l’horreur ou le dégoût. Le but de l'humour noir n'étant pas de faire souffrir mais d'éclairer les masses sur la valeur réelle d'un évènement par rapport à la réalité. Suivant les cultures il évolue entre désespoir et raillerie et sera plus ou moins accepté en fonction de la force des tabous qu’il titille.
L'humour noir se rencontre principalement dans la littérature (roman, nouvelle et micronouvelle), le théâtre, le cinéma, la bande dessinée et le dessin.
On attribue généralement à André Breton l’origine moderne de l’expression, avec son Anthologie de l'humour noir. Celle-ci est employée, avec le sens actuel par Joris-Karl Huysmans dans son texte autobiographique "Joris-Karl Huysmans" publié dans Les Hommes d'aujourd'hui en 1885[3].Joris-Karl Huysmans
L'humour noir dans les médias ou publicité est un sujet à polémique et interdiction[4],[5]. Parmi les célèbres polémiques de l'humour noir, Hitler = SS de Philippe Vuillemin montre la complexité de l'humour à savoir rire de tout[6]. Patrick Timsit fait face à un procès pour un gag d'humour noir sur les trisomiques[1]. Les sketchs de Coluche provoquent la polémique même longtemps après sa mort et on peut constater que dans les années précédant le XXIe siècle les humoristes et penseurs disposaient d'une plus grande liberté[7]. Cela soulève avec humour l'interrogation de créer une haute autorité de l'Humour[8],[9]. En , la chanson de Laura Laune Déclaration d'amour à la France est coupée au montage lors d'une émission sur France 2[10].
Certaines sources relatent les citations célèbres d'humour noir[11].
« Parmi cette liste de mots, cherchez l'intrus : métastase, Schwartzenberg, chimiothérapie, avenir… »
« Elle tomba. Il plongea. Disparus. »
— Félix Fénéon, Nouvelles en trois lignes
« Tu aimes bien ta mère ? Alors reprends un bout. »
« Le sapin, dont on fait les cercueils, est un arbre toujours vert. »
— Xavier Forneret, Encore un an de Sans titre, par un homme noir blanc de visage
« Quand mon père m'a beaucoup battu, il a chaud. Alors je me traîne vers la fenêtre et je la ferme pour qu'il n'attrape pas de courant d'air. »
« Il ne faut jamais gifler un sourd. Il perd la moitié du plaisir. Il sent la gifle mais il ne l'entend pas. »
« La hausse du pétrole entraîne des inquiétudes chez les handicapés-moteurs. »
— Coluche
« Qui a coulé le Titanic ? Iceberg, encore un juif. »
— Serge Gainsbourg, Aphorismes
Serge Gainsbourg étant juif, il fait ici allusion au fait que de nombreux Juifs portent des noms contenant le suffixe « Berg », qui veut dire « montagne » en allemand, et aussi au fait qu'un ressort classique de l'antisémitisme consiste à désigner les Juifs comme responsables de toutes les calamités.
« Halloween : Livraison à domicile pour pédophiles. »
— Laurent Baffie, Le Dictionnaire de Laurent Baffie
« Bal tragique à Colombey : Un mort. »
Le décès du Général De Gaulle ayant eu lieu peu de temps après un incendie tragique dans une salle de bal, le journal a été saisi par décision de justice[12]. François Cavanna avait déclaré à cette occasion que jamais le Général De Gaulle n'avait empêché le journal Hara Kiri de publier et que c'est seulement une fois décédé que l'intéressé était la cause de cette saisie.
Une étude de 2017 a démontré que les personnes réceptives à l'humour noir avaient tendance à avoir un niveau d'étude assez élevé, des émotions stables et n'étaient pas agressives[13].