Shylock | |
Personnage de fiction apparaissant dans Le Marchand de Venise. |
|
Shylock et Jessica, par Maurycy Gottlieb (1876). | |
Sexe | Masculin |
---|---|
Activité | Usurier |
Famille | Jessica (fille) |
Créé par | William Shakespeare |
Pièces | Le Marchand de Venise |
modifier |
Shylock est l'un des personnages les plus marquants du Marchand de Venise de William Shakespeare. Il y tient le rôle d'un riche usurier juif, pratiquant des taux déraisonnables et acharné dans le recouvrement de ses créances.
Son nom est devenu, en anglais courant, synonyme de « requin d’affaires »[1] et le personnage, l’une des incarnations les plus puissantes et durables des préjugés antisémites, avec le Fagin de Charles Dickens[2]. Cependant, Shylock, méprisé de tous, tient aussi une longue tirade sur l'humanité des Juifs et l'absurdité des préjugés antisémites qui en font, dans certaines représentations, un personnage tragique voire sympathique.
Shylock est un prêteur sur gages aigri par le succès de son rival chrétien Antonio (en), le marchand de Venise éponyme ; celui-ci lui fait non seulement péricliter ses affaires en pratiquant des taux d’intérêt modiques mais en outre, il ne cache pas son mépris pour le Juif, crache sur lui (au propre et au figuré), détourne de lui ses amis et monte contre lui ses ennemis.
Shylock est donc réticent à accorder un prêt monétaire à Bassanio sur le compte d'Antonio et n’y consent qu’après avoir fixé en gage une « livre de la chair » d’Antonio. Antonio connaissant un revers de fortune, Shylock exige le recouvrement de sa dette, sachant qu’il entraîne ainsi la mort d’Antonio. Shylock se montre d’autant plus insistant que sa fille unique, Jessica, a fui la maison en dérobant sa fortune pour retrouver Lorenzo, un autre ami d'Antonio, après s’être convertie au christianisme.
Refusant d’accorder son pardon, Shylock perd son procès et se voit confisquer le reste de ses avoirs pour avoir voulu attenter à la vie d’un citoyen vénitien alors qu’il est un « étranger ». Le duc de Venise, auquel la moitié de sa fortune revient (l’autre étant devenue la propriété d'Antonio qui souhaite en faire don à Lorenzo et Jessica), consent à la lui remettre si lui aussi accepte la conversion.
Pris à partie par Portia (en), Shylock répond par un monologue qui constitue l’un des sommets de la pièce :
« [La livre de chair que je réclame à Antonio me servira] à amorcer les poissons.
Si elle ne nourrit rien d’autre, elle nourrira ma vengeance.
Il m’a humilié ; il m’a fait tort d’un demi-million ;
il a ri de mes pertes ; il s’est moqué de mes gains ;
il a humilié ma nation ; il m’a fait manquer des marchés ;
il a refroidi mes amis, échauffé mes ennemis ; et pourquoi ? Je suis Juif.
Un Juif n’a-t-il pas des yeux ? Un Juif n’a-t-il pas, comme un chrétien, des mains,
des organes, des dimensions, des sens, des affections, des passions ?
N’est-il pas nourri de la même nourriture, blessé par les mêmes armes,
sujet aux mêmes maladies, guéri par les mêmes remèdes,
réchauffé et glacé par le même été et le même hiver ?
Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ?
Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ?
Si vous nous empoisonnez, ne mourons-nous pas ?
Et si vous nous faites du mal, ne nous vengerons-nous pas ?
Si nous sommes semblables à vous en tout le reste, nous vous ressemblerons aussi en cela.
Si un Juif cause du tort à un chrétien, quelle est sa modération ? La vengeance.
Si un chrétien cause du tort à un Juif, devra-t-il souffrir à l’exemple des chrétiens ? Il se vengera.
La vilénie que vous m’enseignez, je l’exécuterai ;
et quelque peine qu’il m’en coûte, je dépasserai mes maîtres. »
— acte III, scène 1
Il existe deux autres pièces inspirées par le personnage principal du Marchand de Venise :