Marie-Clémentine Valadon et sa mère, Madeleine Valadon, blanchisseuse, vivent à Montmartre. Marie-Clémentine Valadon devient acrobate de cirque en 1880 jusqu’à ce qu'une chute mette fin prématurément à cette activité[3]. C'est alors qu'elle se rapproche de la sphère artistique et devient modèle pour les artistes sous le prénom de Maria. Elle les observe en posant et apprend ainsi leurs techniques[4]. C’est à cette occasion qu'elle fait la connaissance du peintre Pierre Puvis de Chavannes. Elle pose également pour Auguste Renoir, qui devient aussi son amant. Elle est modèle pour Théophile Alexandre Steinlen, Jean-Jacques Henner et Federico Zandomeneghi. C'est Henri de Toulouse-Lautrec qui lui donne le nom de Suzanne Valadon en référence à l'épisode biblique de Suzanne et les Vieillards[3]. Elle a également plusieurs admirateurs dont Miquel Utrillo, un ingénieur catalan[5], promoteur des arts[5], peintre[5], homme de lettres et critique d'art (journaliste)[6].
À 18 ans, elle attend un fils, Maurice, qui naît le et dont elle dit ne pas connaître le père. C'est à ce moment qu'elle réalise sa première œuvre signée Suzanne Valadon : un autoportrait au pastel[3]. À cette époque, elle fait des dessins, surtout des portraits, à la mine de plomb, au fusain et à la sanguine. Cela devient son activité principale jusqu'en 1909.
Miquel Utrillo, qui s'intéresse à l'enfant, vient régulièrement en visite chez les Valadon. En 1886, Marie-Clémentine et sa mère déménagent rue Tourlaque, dans la maison où Henri de Toulouse-Lautrec loue un atelier. Très vite, ils font connaissance. Elle devient son modèle ainsi que sa maîtresse. Il fera d'elle le portrait intitulé Gueule de bois. Elle l'accompagne partout pendant ses escapades nocturnes. Après avoir découvert par hasard quelques dessins faits par elle, il lui conseille de les montrer à Edgar Degas. Celui-ci est enthousiaste, et Suzanne Valadon devient son élève et sa protégée.
Son fils, appelé à sa naissance Maurice Valadon, prend en 1891 le nom de Maurice Utrillo, nom de famille de Miquel Utrillo, son père putatif, lorsque celui-ci le reconnaît.
Il faut attendre 1892 pour que Suzanne Valadon commence à pratiquer la peinture à l'huile[7]. Elle peint des natures mortes, des bouquets et des paysages marqués par la force de leur composition et leurs couleurs vibrantes. Elle s'inspire aussi de son entourage, ainsi elle brosse les portraits de son fils et de sa mère. Elle peint également des nus.
Elle a une relation avec Erik Satie en 1893. Il lui aurait proposé le mariage au matin de leur première nuit. Seule relation intime connue du musicien, elle le laisse, comme il dira, avec « rien, à part une froide solitude qui remplit la tête avec du vide et le cœur avec de la peine »[8].
Suzanne Valadon expose pour la première fois à la galerie Le Barc de Boutteville en 1893 et 1894. Puis toujours en 1894 au Salon de la Société nationale des beaux-arts (avec cinq dessins)[9].
Elle devient la maîtresse de Paul Mousis, agent de change et ami d'Erik Satie, qu'elle épouse en 1896. Le couple s'installe alors au 12, rue Cortot, en haut de la butte Montmartre. Ce mariage lui donne une stabilité financière qui lui permet de se consacrer à sa peinture et à l'éducation de son fils[7].
Son mariage prend fin en 1909, année où elle expose au Salon d'Automne à Paris (dont elle deviendra Sociétaire jusqu'en 1933). Elle se met en ménage avec l'ami de son fils, le peintre André Utter (1886-1948), qu’elle épouse en 1914[10]. Cette union, houleuse, durera près de trente ans. André Utter en Adam et elle-même en Ève figurent sur l'une de ses toiles les plus connues Adam et Ève (Paris, musée national d'Art moderne). Il s'agit d'une époque où elle oriente ses œuvres vers un plus grand naturalisme comme on le remarque dans La petite fille au miroir (collection particulière) ou La tireuse de cartes (Les amis du Petit Palais, Genève)[7].
Edgar Degas — pour qui elle n'a jamais posé, malgré ce que l'on dit souvent — remarquant les lignes vives de ses esquisses et de ses peintures, encourage ses efforts en lui achetant et collectionnant ses premiers dessins. Elle connaît de son vivant le succès et réussit à se mettre à l'abri des difficultés financières de sa jeunesse, pourvoyant aux besoins de son fils.
Berthe Weill la soutiendra efficacement en lui permettant de participer, dans ses galeries successives, à 15 expositions de groupe et en lui offrant 3 expositions personnelles (1915, 1927 et 1928)[11].
En 1923, Suzanne Valadon achète avec Utter le château de Saint-Bernard, au nord de Lyon, pour tenter d'entraver l'alcoolisme de son fils. Maurice Utrillo peint le château ainsi que l’église ou encore le restaurant du village[12].
À la fin de sa vie, Suzanne Valadon se lie d'amitié avec le peintre Gazi-Igna Ghirei, dit Gazi le Tatar (1900-1975)[13] et, poussée par cette rencontre, se remet à peindre[14]. Elle participe alors aux expositions de groupe organisées par la Société des femmes artistes modernes (FAM), créée en 1931.
Sannois, musée Utrillo-Valadon (fermé depuis 2014) : Portrait de la mère de Bernard Lemaire, 1894, huile sur panneau, 52 × 40 cm, déposé au musée de Montmartre.
2020-2021 : Suzanne Valadon et ses contemporaines : l'art moderne au féminin, musée des Beaux-Arts de Limoges, du au , puis à Bourg-en-Bresse, prévu du au [24] puis reporté du 19 mai au 5 septembre 2021[25].
↑Miquel Utrillo i Morlius (en catalan), Diccionari d'historiadors de l'art català, valencià i balear. [accédé le 30-01-2023].
↑ ab et cCamille Viéville, « VALADON MARIE-CLÉMENTINE dite SUZANNE - (1865-1938) », Encyclopedia Universalis, consulté le 18 juillet 2023 (lire en ligne).
↑Patrice Delbourg, Les Jongleurs de Mots : De François Villon à Raymond Devos, Ecritures, , 600 p. (lire en ligne).
↑Il est parfois dit qu'elle fut la 1re femme à y exposer. Or, dès le 1er Salon de la SNBA de 1890, plus de 60 femmes y exposèrent. Et au Salon de 1894, on en dénombarait près de 80. Se référer aux Catalogues de ce Salon (édités sous la direction de Pierre Sanchez).
↑Selon son acte de mariage daté du à Paris 18e, visible sur le site en ligne des archives départementales de Paris, cote 18M459, acte 2409. Les témoins à son mariage sont Germain Delonorié, Joseph Desonnay, Alexandre Gagneu et Marthe Gex.
↑Marianne Le Morvan, Berthe Weill 1865-1951 La petite galeriste des grands artistes, L'écarlate, collection « L'art au féminin », 2011, p. 212.
Marc Restellini, Jean Fabris, Jacqueline Munck, Jean-Pierre Valeix, Sophie Krebs, Valadon, Utrillo. Au tournant du siècle à Montmartre. De l'Impressionnisme à l'École de Paris, [catalogue d'exposition], Éd. Pinacothèque de Paris, 2009 (ISBN9782358670012).
Robert Rey, Suzanne Valadon, Paris, NRF, coll. « Les Peintres français nouveaux », 1922.
Le Salon d'Automne à travers ses affiches de 1903 à nos jours, Paris, Éditions Lelivredart, 2019 (ISBN978-2-35532-334-8).