Varron (Marcus Terentius Varro) est un écrivain, savant et magistrat romain de condition équestre, né à Reate (auj. Rieti), en Sabine, en et mort en Ses écrits, dont l'essentiel ne nous est pas parvenu, apportent quelques éclairages sur l'étymologie des mots latins et l'organisation des connaissances à Rome à la fin de la République.
De 76 à , il participe comme légat et proquesteur à la campagne menée en Espagne par Pompée contre Sertorius. Il en profite pour faire des observations sur les pratiques d'agriculture et d'élevage, dont on retrouve la trace dans le De re rustica. En 70, il est tribun de la plèbe[13],[12],[14]. En 67, il est de nouveau aux côtés de Pompée dans la guerre contre les pirates[15], menée en vertu de la lex Gabinia ; il se voit confier la surveillance d'un secteur allant de la Sicile vers Délos. En , il est un des vigintiviri chargés de la distribution de l'ager Campanus, en application de la loi agraire de César[10]. Il parvint au rang de préteur[16],[17].
En , pendant les guerres civiles romaines, il est légat de Pompée en Hispanie ultérieure, contre Jules César. Cette province et ses légions se ralliant à César, Varron capitule et se rend à ce dernier[18]. En 47, Marc Antoine s'installe dans sa villa de campagne à Casinum dans le Latium et, selon Cicéron, y mène les pires orgies[19].
Ayant obtenu le pardon de César, il se rallie à lui. En , César le charge de l'organisation des premières bibliothèques publiques de Rome[10],[20],[21],[22].
Varron est l'époux d'une Fundania, fille de C. Fundanius, tribun de la plèbe en [26],[27],[28]. Ses deux oncles maternels sont L. Corfidius, chevalier mort avant , et un Corfidius dont le prænomen n'est pas connu[26],[29],[30].
Il était de la famille de Gaius Terentius Varro, consul en -216, Marcus Terentius Varro Lucullus et Aulus Terentius Varrus Murena, consul en -23, assassiné.
Varron est un « grand propriétaire »[31]. Il devient propriétaire à Cumae[31] et à Tusculum[31] ainsi qu'à Casinum[31] où il pratique un « luxueux et lucratif élevage d'oiseaux »[31]. Il parcourt souvent ses propriétés[32] qui produisent notamment des figues[32] et du miel[32]. Il possède également des troupeaux de moutons[32].
Pour Quintilien, Varron est « le plus savant des Romains »[33],[34] ; pour Plutarque, « le plus savant des Romains dans l'histoire »[33],[35] ; pour Columelle, un « écrivain remarquable »[33],[36] ; et, pour Symmaque, « le père de l'érudition latine »[33].
Il est l'auteur de près de 600 volumes, mais seule une cinquantaine nous est parvenue en plusieurs fragments, alors que la seule œuvre complète est le De re rustica[37]. Cette œuvre est considérée comme une importante contribution au développement des encyclopédies, en raison de l'idée très claire que Varron se faisait de l'organisation du savoir. Ainsi, les Disciplinarum consacraient chaque livre à un sujet distinct, en l'occurrence les sept arts libéraux.
Son Antiquitates rerum consacrait les 25 premiers livres aux affaires humaines et les 16 suivants aux divinités[38]. Cet érudit est réputé avoir fixé le premier de façon intangible la date de la création de Rome à l'an , référence employée officiellement par l'administration romaine après lui.
Le De re rustica libri III : Économie rurale[39] est un traité d'agriculture en trois volumes, dont nous avons conservé la totalité ; ce sont trois livres adressés à sa femme Fundania[40] : l'art du cultivateur, les troupeaux, l'économie rurale ;
De lingua latina en 25 livres : De la langue latine fut longtemps une référence pour les grammairiens latins et nous en avons conservé le quart ;
les Satires Ménippées : poèmes satiriques, dont seuls quelques fragments nous sont parvenus ;
Les Epistulae (« Lettres ») et les Epistolicae quaestiones (« Questions épistolaires ») [éd. Bipont, éd. Wolff] ne sont connues que fragmentairement.
Ouvrages perdus dont il ne reste que des fragments :
Antiquitates rerum humanarum et divinarum(it) (ou encore Antiquitates rerum humanarum et divinarum libri XLI, « Des choses humaines et divines antiques », en 41 livres) : ouvrage de nature encyclopédique dont certaines parties servirent de référence aux pères de l'Église chrétienne en matière de religion romaine païenne ;
Logistoricon libri LXXVI ;
Hebdomades vel de imaginibus ;
Disciplinarum libri IX : ouvrage consacré aux sept arts libéraux.
↑Pour Nicolet, cela se déduit des indices suivants : la modestie et la lenteur relative de sa carrière ; ses liens de parenté avec le chevalier L. Corfidius (mari de sa tante maternelle) ; l'appartenance de son beau-père C. Fundanius à l'ordre équestre ; une allusion dans une ménippée à la redditio du cheval public, démarche obligatoire pour les chevaliers qui voulant aborder le cursus honorum et obtenir une place au Sénat[8].
↑Broughton 1952, annexe II, s.v. tribunes of the pleb, s.v.M. Terentius Varro, p. 473, col. 2.
↑La plupart des faits connus sur la carrière de Varron nous sont connus par le Nuits attiques d'Aulu-Gelle. Cf. en outre G. Boissier, La vie et les ouvrages de Varron, Paris, Hachette & Cie, , PDF (lire en ligne), ainsi que (de) K. L. Roth, Über das Leben des M. Terentius Varro, Bâle, .
↑D'après (en) Thomas Spencer Baynes, The Encyclopaedia Britannica : A Dictionary of Arts, Sciences, and General Literature, C. Scribner's sons, (lire en ligne), « Marcus Terentius Varro »
↑ a et b« Varro, Marcus Terentius », in Encyclopædia Britannica 2007 Ultimate Reference Suite (2008).
↑Robert Collison, Encyclopaedias: their history throughout the ages, New York, Hafner, 1964, p. 23.
↑On peut en situer le début de la rédaction en 37 ou 36, puisque Varron déclare au début du premier livre (I, I.1): « ma quatre-vingtième année m'invite à rassembler mes bagages avant de quitter la vie ».
↑Varron dédie cependant le livre II (Introd. 6) à son ami Turranius Niger, et le livre III (I.1 et 9-10) à un autre ami, Pinnius, alors qu'il "avait promis les trois livres à sa femme", comme le remarque le traducteur William Davis Hooper.
Économie rurale, trad. J. Heurgon et Ch. Guiraud, Paris, Les Belles Lettres, coll. des Universités de France, 3 t. (LXXXV-277 p., 1978 ; XVII-172 p., 1985 ; XXXIII-176 p., 1997), 2° éd. 2003
La Langue latine, trad. P. Flobert, Paris, Les Belles Lettres, coll. des Universités de France. T. II : livre VI, XLI-228 p., 1985, 2e éd. 2004
Satires Ménippées, éd., trad. et commentaire par Jean-Pierre Cèbe (Collection de l'École française de Rome, 9/1 à 13), Rome, École française de Rome ; Paris, diffusion De Boccard, 13 vol., 1972-1999. Volumes en accès libre sur Persée.
Jean Collart, Varron, grammairien latin (« Publications de la faculté des lettres de l'université de Strasbourg », 121), Paris, 1954, 377 p.
(it) Francesco Della Corte(it), Varrone, il terzo gran lume romano, Gênes, 1954 ; 2e éd., Florence, 1970.
Jean Pépin, « La « théologie tripartite » de Varron. Essai de reconstitution et recherche des sources », dans Mémorial Gustave Bardy [Revue des Études augustiniennes 2, 1956], t. II, p. 265‑294.
(en) Daniel J. Taylor, Declinatio: A Study of the Linguistic Theory of Marcus Terentius Varro (coll. « Studies in the History of the Language Sciences », 2), Amsterdam, John Benjamins, 1974, XV-131 p. (réimpr. 1988). (ISBN90-272-0893-X)
Lucienne Deschamps, Étude sur la langue de Varron dans les Satires Ménippées, 2 vol., Lille-Paris, 1976.
[Deschamps 1986] Lucienne Deschamps, « Le paysage sabin dans l'œuvre de Varron », Humanitas, nos 37-38, , p. 123-137 (OCLC490216986, lire en ligne [PDF]).
(it) F. Cavazza, Studio su Varrone etimologo e grammatico, Florence, 1981, 202 p.
Yves Lehmann, Varron théologien et philosophe romain, Bruxelles, Latomus, 1997, consultable sur Persée.
Aude Lehmann, Varron critique littéraire. Regards sur les poètes latins archaïques, Bruxelles, Latomus, 2002.